L’IRAC réagit au Cadre réglementaire pour plafonner les émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier du Canada | Institut royal d'architecture du Canada

L’IRAC réagit au Cadre réglementaire pour plafonner les émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier du Canada

Le 5 février 2024

À l’attention du gouvernement du Canada

Veuillez trouver ci-dessous les observations écrites formelles de l’Institut royal d’architecture du Canada (IRAC) concernant le Cadre réglementaire pour plafonner les émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier.

L’IRAC est extrêmement préoccupé par la crise climatique et par ce qui attend les générations futures si nous ne nous affranchissons par des combustibles fossiles le plus tôt possible. Nous nous sommes réjouis de l’annonce d’un plafonnement des émissions, mais nous craignons tout de même que cette mesure ne soit pas mise en œuvre au rythme accéléré et à l’échelle nécessaires pour un changement significatif.

Au nom de l’IRAC et de la communauté architecturale, nous demandons :

1) De fixer des cibles de plafonnement ambitieuses qui obligent les compagnies pétrolières et gazières à se conformer à une cible de réduction de 60 pour cent afin de respecter les normes des recommandations de l’Agence internationale de l’énergie et les cibles que le Canada s’est lui-même fixées.

2) De réduire dans la plus grande mesure possible les occasions de compter sur le captage et le stockage du carbone, ainsi que sur la compensation du carbone plutôt que de se concentrer sur la réduction des émissions physiques.

3) De s’assurer que toutes les émissions de GES provenant de la production et de l’utilisation de gaz et de pétrole soient incluses dans le plafonnement des émissions.

4) De prendre des mesures de reddition de comptes immédiates, formelles et audacieuses pour assurer la conformité.

5) De prendre immédiatement les mesures pour la mise en œuvre des plafonnements des émissions pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2025.

6) De mettre l’accent sur les individus et tous les organismes vivants plutôt que sur les profits – les décisions prises aujourd’hui auront des incidences sur le bien-être et la survie des générations futures.

Le plafonnement des émissions doit être mis en œuvre sans délai. Il s’est déjà écoulé beaucoup trop de temps depuis la première proposition de cette politique et le lobby du secteur pétrolier et gazier a déjà trop retardé le processus.

Le cadre réglementaire de plafonnement ne doit laisser place à aucune échappatoire et ne prévoir aucune exemption pour le secteur pétrolier et gazier. Aucun fond de décarbonation ne doit être proposé, car un fond ne représente pas les réductions réelles des émissions. Le cadre réglementaire doit être contraignant pour l’ensemble du secteur pétrolier et gazier sans exception, et il doit se concentrer sur les réductions des émissions physiques réelles du secteur et non pas sur des crédits compensatoires.

Le plafonnement des émissions ne doit pas accorder une préférence particulière au GNL ou à d’autres combustibles du fait que le secteur prétend qu’ils sont « plus propres », car ils ne nous aideront pas à atteindre les cibles climatiques. Il ne faut pas non plus exempter le méthane du cadre de plafonnement, de quelque manière que ce soit. Soulignons à cet effet que de grandes quantités d’émissions provenant des sables bitumineux ne sont pas déclarées chaque année et que le Canada sous-estime les émissions des sables bitumineux de près de 6000 pour cent, ce qui rend d’autant plus important un plafonnement bien réglementé et contrôlé (1).

La véritable prospérité des communautés passe par le soutien au développement de projets d’énergie renouvelable locaux, comme la ferme solaire de 4,86 mégawatts de la Nation métisse de l’Alberta qui alimentera 1 200 foyers et évitera le rejet dans l’atmosphère de 4 700 tonnes d’émissions de dioxyde de carbone chaque année (2).

Des communautés de la grandeur du pays, et des communautés autochtones en particulier, ont été durement touchées par des incendies de forêt l’été dernier (3) et subissent les conséquences néfastes de l’inaction du secteur pétrolier et gazier pour s’attaquer aux émissions (4).

En parallèle, la contribution du secteur pétrolier et gazier à l’emploi et au revenu au Canada est de moins en moins grande, même en contexte de croissance (5).

Les mesures proposées dans le cadre de plafonnement sont une première étape positive, mais elles doivent être renforcées pour s’harmoniser avec les cibles climatiques du Canada qui visent une réduction de 40 à 45 pour cent des émissions à l’horizon 2030. L’Agence internationale de l’énergie préconise également à une réduction des 60 pour cent des émissions pétrolières et gazières d’ici 2030 pour éviter les pires catastrophes climatiques (6).

La question du plafonnement n’oppose pas l’Alberta au reste du Canada. Deux sondages indépendants récents ont révélé qu’une majorité d’Albertains soutiennent un plafonnement des émissions (7). Le plafonnement obtient également un appui majoritaire auprès des Canadiens, soit 7 sur 10. Le président du Congrès du travail du Canada et les Syndicats des métiers de la construction du Canada se sont également prononcés en faveur du plafonnement.

Le plafonnement des émissions est une question d’équité pour les Canadiens. Comme individus, nous faisons notre part pour lutter contre le changement climatique; le secteur pétrolier et gazier devrait être tenu de faire de même. Ce secteur, qui ne représente que 5 pour cent de l’économie canadienne, est le plus polluant du Canada, à l’origine de 27 pour cent des émissions nationales (9, 10).

Nous, comme individus, ne devrions pas avoir à payer pour nettoyer les dégâts causés par le secteur pétrolier et gazier parce qu’il refuse de contribuer à la lutte au changement climatique. Le plafonnement des émissions ne coûtera rien aux consommateurs. Le secteur pétrolier et gazier est capable de faire sa part pour diminuer les émissions, d’autant plus qu’il a réalisé d’énormes profits. Sur chaque dollar d’inflation au cours des deux dernières années au Canada, 25 cents sont allés aux profits tirés de l’extraction pétrolière, gazière et minière (11).

Un plafonnement des émissions au même niveau que la cible climatique nationale du Canada (45 pour cent en dessous des niveaux de 2005 d’ici à 2030) permettrait également d’éviter le décès prématuré de quelque 4 860 personnes au Canada sur une période de dix ans, et ce, avant même de tenir compte du changement climatique et des impacts non mortels de la pollution de l’air évitée par un plafonnement ambitieux (12).

Il est essentiel de réduire la pollution des sociétés pétrolières et gazières pour atteindre les cibles climatiques. Le moment est venu pour le Canada d’assumer un leadership non seulement pour s’engager, mais aussi pour mettre énergiquement en œuvre un cadre qui limite les émissions provenant de la production pétrolière et gazière.

Meilleures salutations,

 

Mike Brenann, Hon. MRAIC, Hon. RAIA                     Jason Robbins, FRAIC, Hon. RAIA
Chef de la direction                                                      Président

À propos de l’IRAC

L’Institut royal d’architecture du Canada (IRAC) est un organisme national à but non lucratif qui représente les architectes et l’architecture depuis 1907. L’IRAC est le seul porte-parole national de l’excellence dans le cadre bâti au Canada. Il s’emploie à offrir à la communauté architecturale du Canada les outils, les ressources et l’éducation qui l’aideront à rehausser sa pratique. L’IRAC est déterminé à montrer comment la conception améliore la qualité de vie tout en défendant les enjeux de société importants par une architecture responsable. Il a comme objectif de créer un monde meilleur pour tous en donnant à la communauté architecturale du Canada les moyens d’agir. Par son travail, l’IRAC a la vision d’une communauté architecturale forte qui est appréciée et en mesure de créer le changement. Le bureau national de l’organisme est à Ottawa et son modèle de sections régionales fédérées est en pleine croissance, comptant des sections et des réseaux en Colombie-Britannique, en Alberta et en Nouvelle-Écosse.

 

Références

(1) https://www.science.org/doi/10.1126/science.adj6233;

https://www.independent.co.uk/climate-change/news/canada-emissions-toxic-oil-sands-b2484917.html;  

https://environmentaldefence.ca/2022/10/26/dont-buy-the-hype-lng-is-bad-for-the-climate/; https://www.ipolitics.ca/opinions/canadian-gas-wont-help-europe-help-ukraine;

https://www.nationalobserver.com/2022/06/28/opinion/message-ukraine-dont-be-fooled-push-new-lng-export-facilities.  

(2) https://www.theenergymix.com/alberta-metis-solar-farm-delivers-4-86-nw-builds-sovereignty-and-self-sufficiency/

(3) https://apnews.com/article/canada-wildfire-indigenous-land-first-nations-impact-3faabbfadfe434d0bd9ecafb8770afce

(4) https://www.cbc.ca/news/canada/wildfires-climate-change-carbon-88-1.6852178

(5) https://policyalternatives.ca/publications/reports/canada%e2%80%99s-energy-sector

(6) https://www.iea.org/reports/the-oil-and-gas-industry-in-net-zero-transitions/executive-summary

(7) https://www.cbc.ca/news/canada/edmonton/slim-majority-of-albertans-support-national-oil-and-gas-emissions-cap-polls-suggest-1.6966787

(8) https://climateactionnetwork.ca/fr/un-nouveau-sondage-revele-que-7-canadien-ne-s-sur-10-veulent-un-plafond-demissions-pour-le-petrole-et-le-gaz-pour-sassurer-que-lindustrie-assume-sa-juste-part-de-laction-climatique/

(9) https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/36-28-0001/2021007/article/00003-eng.htm

(10) https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/36-28-0001/2021007/article/00003-fra.htm

(11) https://environmentaldefence.ca/2023/02/03/big-oil-is-posting-colossal-2022-profits/;

https://www.facebook.com/reel/885766123024660

(12) https://cape.ca/fr/press_release/juste-plafond-demission-pour-secteur-petrolier-et-gazier-previendrait-4-800-deces-prematures-au-canada/